mercredi 12 décembre 2007

TOM VERLAINE : Cover

LP, Virgin V2314, septembre 1984

Guitars ! C’est ainsi que débute le texte publié dans le livret du cd live de Television, The Blow Up, et ce mot résume en effet tout ce à quoi on s’attend lorsqu’on aborde un morceau écrit par Tom Verlaine, en groupe ou en solo. Si Cover est déconcertant, c’est que Verlaine y a partiellement délaissé son instrument de prédilection pour tâter de technologies plus modernes. Les guitares ne sont certes pas totalement absentes et elles se taillent parfois de belles parts (« Miss Emily ») mais certains morceaux (« O Foolish Heart », « Dissolve / Reveal ») sont construits autour de parties de synthétiseurs. Et comme « O Foolish Heart », d’une beauté saisissante, est l’un des morceaux essentiels de l’œuvre de Verlaine, nous ne parlerons pas ici d’une tocade ou d’un cul de sac de l’époque mais d’une volonté délibérée de s’approprier des sons nouveaux et de les mettre au service d’une inspiration qui n’a pas ici failli.

Verlaine agit sur Cover en artiste (post-)moderne : s’il joue du synthétiseurs, c’est à sa manière (il assure toutes les parties de claviers, affirmant qu’elles étaient assez simples pour qu’il puisse le faire) ; comme la planche à voile de la pochette qui apparaît sur le toit d’une voiture passant dans une rue de Londres, l’instrument semble totalement incongru ici mais il finit par conquérir sa place dans l’ensemble, dans l’équilibre des lignes. Et ces synthétiseurs cohabiteront à l’occasion avec des guitares aux échos ancestraux. Verlaine prend par ailleurs un malin plaisir à ramener l’instrumentation à l’essentiel et à ne procéder pour chaque morceau que par touches que l’on pourrait qualifier d’impressionnistes : les parties de claviers, de guitares, de batteries ou de boites à rythmes se réduisent la plupart du temps à quelques notes discontinues (« Let Go The Mansion », « Travelling », « Dissolve / Reveal, « Swim »…) mais là encore une harmonie finit par naître de ce collage de sons. Et une sorte de grâce, de légèreté, également. Ces morceaux auront du coup du mal à exister en concert ; ainsi, seuls trois titres de l’album seront interprétés lors du concert donné à l’Electric Ballroom de Londres le 4 octobre 1984, concert pourtant donné pour la promotion de l’album, et dans des versions tout en guitares, assez éloignées des fragments de sons sortis des studios.

Si Cover demeure singulier dans la discographie de Verlaine, difficile pourtant d’y voir un album de rupture : il est ici entouré de fidèles, de Fred Smith (déjà bassiste pour Television) à Jay Dee Daugherty, Allan Schwartzberg, ou encore Jimmy Ripp (déjà tous présents sur Words From The Front, son troisième album solo, publié en 1982) et l’ambiance est trop sereine pour que l’on imagine une quelconque volonté de s’affranchir de quoi que ce soit. Les relations humaines demeurent au cœur de ses préoccupations et de ses lyrics. De manière plus inattendue, il se révèle dans ce disque, enregistré à New York, Los Angeles et Londres d’une manière très détendue selon leur auteur, presque sentimental sur plusieurs titres (« O Foolish Heart », « Swim ») même s’il garde une distance rieuse probablement plus parce que c’est dans sa nature que par peur de la guimauve. Néanmoins son sourire sur la pochette comme la tonalité aérienne de cet album font de Cover une œuvre définitivement lumineuse, colorée et (paradoxalement ?) chaleureuse.

singles extraits de l’album

  • Let Go The Mansion (7" & 12" single, Virgin VS 696, 1984)
  • Five Miles Of You (7" & 12" single, Virgin VS 704, 1984)

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